mercredi 11 septembre 2013

Baisers volés de François Truffaut (1968)


Après avoir vu La Maman et la Putain de Jean Eustache, avec comme acteur principal Jean-Pierre Léaud, je me demandais ce qui m'avait bouleversé dans ce film. Je savais que c'était les textes joués par Léaud, mais je me demandais encore si c'était grâce à Jean Eustache, qui avait aussi écrit le métrage, ou si c'était grâce à Léaud. Et bien après avoir vu Baisers volés, je sais que c'est au moins grâce à ce dernier.

Quel acteur ! Je l'a-dore. Il est incroyable. Fuyant et désinvolte, nerveux et attachant, impulsif et fin. Il n'y en qu'un comme lui. Il crée un rythme dans la narration très vif, haletant, il répond toujours du tac au tac, prévoyant à l'avance les réponses possibles de son interlocuteur, il sait déjà ce qu'il va répondre avant que l'autre est commencé à parler, ce qui le rend à leur yeux assez énervant, à juste titre car c'est assez agressif comme comportement. Il n'est pas à l'aise dans les relations, ainsi soit il ne dit rien ou balbutie presque, soit au contraire il parle à toute vitesse sans laisser à l'autre le temps de l'apaiser. Et cela, aussi bien dans Baisers volés que dans La Maman et La Putain. Je me demande d'ailleurs, s'il n'y a pas eu des modifications dans les textes joués par Léaud, afin que ça colle mieux au personnage, non pas au personnage fictif, Antoine Doinel, mais à l'acteur. Car entre les deux films les dialogues sont souvent équivalent, sur le même ton, avec le même genre de répartie. Bon à la différence que dans La Maman et La Putain, il semble toujours sur de lui  lorsqu'il flirte, alors qu'ici, il est au contraire apeuré. Et quand, Fabienne Tabard jouée par Delphine Seyrig, la femme qu'il aime donc, passe chez lui, la seule chose qu'il fait c'est se cacher sous ses draps et rester muet, la fuyant sans cesse du regard. Un autre cas assez classique chez cet acteur : quand on lui propose deux alternatives, il va toujours se débrouiller pour en choisir une troisième, comme s'il voulait garder le contrôle. Comme souvent sa troisième alternative est absurde et à son désavantage, c'est toujours très drôle. Un exemple : il va voir une prostituée lui donne de l'argent, la prostituée lui répond que s'il veut, elle se déshabille complétement pour quelques francs supplémentaires. Ce qu'il fait : à la fois il lui répond d'accord et lui donne de l'argent, mais en plus il lui beaucoup plus que l'argent escompté, pour finalement lui dire de rester habillé, car il s'en fiche. Oui, Jean-Pierre Léaud s'en fiche souvent, dès qu'il ne sait pas trancher entre deux décisions ou plutôt ! Dès qu'il aimerait prendre la décision qu'il assume le moins, il dira qu'il s'en fiche, une manière de se protéger surement, mais aussi grande source de frustration pour lui, à nos yeux ça le rend innocent mais surtout attachant. Et la trame de tout le film dépend de ce manque de confiance en lui. Car au début, il est amoureux de Christine Darbon jouée par Claude Jade, mais comme il hésite à lui dire ce qu'il pense d'elle et comme, quand il lui propose un rendez-vous, il fait les choses qu'à moitié, par peur sans doute, et bien elle est déçue et commence à douter de son amour pour elle. Pendant ce temps, Antoine, va voguer de travail en travail, il n'est pas très doué, d'abord viré de l'armée avant la fin de son contrat, il sera par la suite licencié du travail de veilleur de nuit, puis enfin de détective privé. Et c'est finalement, à la suite de ces expériences, qu'il va murir, et se mettre véritablement avec Christine son amour de deux ans. Bien sûr entre temps il va tomber amoureux de Fabienne Tabard, la femme de George Tabard, qu'il espionne en tant que détective. Cette femme plus vieille, il ne sera pas capable de s'en remettre et une fois qu'il eut une aventure avec elle, il comprendra que sa vie doit être passée avec Christine. Il sera d'ailleurs virer par son agence de détective qui dira qu'on ne fait pas payer 200 000 francs un homme (George Tabard) pour le rendre cocu.

J'ai adoré ce film, mention spéciale à Delphine Seyrig qui dégage toujours ce charme fou, et cette voix, quelle voix ! Éraillée, grave, subtile, magnifique ! D'ailleurs une de ses interventions m'a marqué, elle explique à son jeune amant la différence entre la diplomatie et le tact :
“Imagine que tu entres par inadvertance dans une salle de bains où une femme est nue sous la douche. La politesse exige que tu fermes vite la porte et que tu dises « Pardon, madame ! » alors que le tact consisterait à fermer rapidement la porte et dire : « Pardon monsieur ! »”
Sympa n'est-ce pas ?
Baisers volés est le troisième volet des aventures d'Antoine Doinel inspiré du roman de Balzac, Le Lys dans la Valée (1836), je regarderai prochainement les autres avec plaisirs.

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