mercredi 11 septembre 2013

L'apologie de Socrate par Platon (- 385)


Socrate, philosophe athénien est condamné durant son procès pour corruption de la jeunesse athénienne. Platon, raconte son histoire mais clairement pas de manière objective, car deux autres personnes décrivent le procès à leur tour, Xénophon qui n'ayant pu assister au procès rapporte les propos d'Hermogène et dans la comédie d'Aristophane. Il est difficile de dissocier le vrai du faux, tellement les rapports de ces trois hommes sont différents, malgré de nombreuses similitudes.

Mais ce n'est pas de cela dont je parlerai, je ne souhaite pas comparer chaque version, pour tenter de trier le vraisemblable du fictif. Non, ce qui m'intéresse c'est la démocratie. Car c'est soit disant selon des principes démocratiques que Socrate a été condamné.

Nombre d'historiens apportent cette voix, qui dit que la démocratie est apparue à Athènes vers le 5éme siècle avant Jésus Christ, en effet à l'exception des femmes et des esclaves, tout le monde pouvait accéder au pouvoir politique, du jeune paysan aux vieux commerçants, des simples penseurs aux riches maîtres. Oui bon, aussi à part les Athéniens qui ne seraient pas nés de deux parents originaires de la cité ou qui n'aurait pas 20 ans ou pas fait leur service militaire de 18 à 20 ans. Bon ok, en enlevant tous les cas, ça ne faisait finalement que 40 000 citoyens sur 340 000 personnes ! Moins d'un huitième de la population donc... Les mandats duraient un an, ce qui permettait à nombre d'entre eux de participer à la politique de la cité. De même, les procès étaient soit composés d'environ 500 conseillers (le conseil des 500) ou de 6000 juges, provenant de tout milieu car tiraient au sort ! Pourtant Socrate, si on ne s'intéresse qu'à l'Apologie semble avoir été condamné injustement.

Voilà ce qu'il s'est passé. Socrate était surement le penseur le plus respecté de son temps, il avait de nombreux disciples ou sympathisants, qui aimaient l'affronter directement dans une joute d'arguments que Socrate gagnait toujours. Dans une cité riche comme Athènes, où l'image est très importante : porter de beaux habits, se faire bien voir, montrer sa richesse et sa réussite aux yeux des autres, Socrate passait pour un vieux fou, se baladant pieds nus à travers les rues, affublé de vêtements en lambeaux, sans jamais le moindre sous, réclamant toujours des aides pécuniaires à ses amis et portant une coupe de cheveux ridicule. Car pour lui, comme il le dit si bien dans le Phédon, le vrai luxe c'est l'obtention de la vérité et non les plaisirs du corps. D'ailleurs, il passera sa vie, à s'échapper de ce genre de plaisirs funestes, afin d'être plus à même de penser comme un philosophe digne de ce nom. Pour lui, un philosophe doit agir comme ça et s'entraîne ainsi toute sa vie à mourir. Car selon, lui c'est lors de la mort, qu'il définit comme la séparation de l'âme et du corps et non comme la fin de l'existence, qu'un philosophe, s'il a vécu comme il le décrit, accède à toutes les vérités, le bonheur ultime. Ce qui vaut bien le sacrifice de quelques années sans plaisir des sens. Ainsi, Socrate était mal-vu et surement jalousait car les autres étaient dans l'incompréhension en voyant un être si génial fut-il, vivre si modestement.
Un jour, il rencontra des riches qui se disaient avoir acquis la sagesse, après réflexion, Socrate se dit que quiconque se pensant sage ne l'est pas. La vraie sagesse, c'est de savoir qu'on ne sera jamais sage, en effet, si on commence à se spécialiser dans un domaine, on se rend compte que plus on en apprend, plus on se rend compte qu'on ne connaît rien, ainsi on ne peut jamais être suffisamment expérimenté dans ce domaine. Et Socrate, répondait donc à tout ce qui se réclamait être des sages, qu'ils ne l'étaient point et pire encore, qu'ils étaient moins sage que lui, vu que lui ne décrétait pas qu'il était un sage. Bien que vexant, tout ceci n'avait alors pas d'impact sur la cité, car c'était à une trop petite échelle. Mais petit à petit, les enfants de ses disciples, en écoutant son discours firent de même, et le phénomène eut donc une importance grandissante, si bien que de riches athéniens, principalement Mélétos, Anytos et Lycon, voulurent le juger pour le mettre à mort. Le procès eut lieu, c'était serré, mais les partisans de la condamnation à mort était un tout petit peu plus nombreux. Socrate à ce moment-là étant vieux et enclin à une bonne réputation, on lui fit une fleur en lui proposant de choisir lui-même sa peine. Sachant très bien qu'il n'avait pas fait de mal et assumant totalement ses actes : il proposa qu'on lui offre un repas au Prytanée, un honneur immense accordé aux bienfaiteurs de la cité. Les juges, fou de rages décidèrent par une grande majorité de le condamner à mort. Ainsi, il fut condamné à consommer la ciguë, un poison mortel, après avoir passé 30 jours en prison, ce qu'il fit la tête haute et sans tristesse, malgré que Criton l'un de ses amis fidèles, lui est proposé à maintes reprises de le libérer de prison. Socrate mourut donc dans ces conditions.

On sort de l'apologie de Socrate en se disant : "mais c'est impossible qu'on puisse être condamné pour si peu, la justice était vraiment différente à l'époque !". Mais en fait, la réalité est tout autre. Dans l'ouvrage Démocratie II et surement dans d'autres, on apprend que Socrate était contre la démocratie pour de nombreuses raisons. La démocratie lors des élections engendre la compétition, qui engendre que des imposteurs se mélangent à des sages. De plus, les choix seraient affectifs et donc sans autorité. Socrate est élitiste, il pense que seul les gens instruits, modestes et honnêtes devraient accéder au pouvoir en somme les philosophes, car déjà le principe est immoral. Comment un individu pourrait-il vouloir se mettre à ce point au-dessus des autres par son pouvoir politique ?  - pensant à la place d'une majorité. Sans parler des actions possibles pour défaire ses adversaires lors de compétition politique : corruption, diffamation etc... Il termine en disant : "Or, si l'on oppose l'être au paraître, la justice à l'injustice, comme les choses vraies sont opposées aux choses fausses, il faut donc croire, mon cher Eurythmos, que les hommes politiques sont dans le faux le plus total et que la société qu'ils façonnent avance toute entière vers le faux.... Telle est, ce me semble, la conclusion de tout notre discours qui avait trait à la démocratie et à son mode de fonctionnement."


On comprend alors que Socrate a en fait été condamné car il était contre la démocratie, pensant que le pouvoir politique ne devait être rempli que par une élite et non accessible par le croquant standard. Cela change tout ! Mélétos, Anytos, Lycon et la majorité des Athéniens, étaient eux partisan de la démocratie, du pouvoir pour tous les citoyens. C'était très tabou à l'époque de penser autrement ! Ce que pensait Socrate et nombre de ses disciples d'ailleurs tous penseurs, étaient plus proches de notre démocratie actuelle ou de celle spartiate à leur époque ! Autre tabou important, ne pas croire aux Dieux grecques. Ce dont Socrate fut accusé de manière diffamatoire durant le procès.

Finalement, Socrate était un anticonformiste, car il pensait très différemment de ses contemporains, prépondérance de la vérité sur la luxure, importance d'une vie basée sur la simplicité, importance de l'intellect sur les richesses matérielles, accession au pouvoir politique que par des penseurs pour que cela soit plus juste et que ça ne suive pas forcément l'opinion public du premier abord. Tout ceci, dans une logique d'amélioration de l’adaptabilité d’une société, d'ouverture d'esprit, plutôt que d'être gouverné par des hommes qui respectent toujours la même manière de vivre. D'une certaine manière, il prônait un peu le système français actuel, car en mettant au pouvoir les plus instruits, il était plus difficile à la masse de suivre les discours. Le peuple s'intéressant de moins en moins à la politique, il n'agirait et ne penserait plus par lui-même. Actuellement c'est qui se passe, chaque jour des lois passent sans que personne ne s'y intéresse et le site Légifrance.org, reste difficile d'accès car respecte un langage juridique. Et puis, le peuple même s'il veut agir politiquement ne le peut absolument pas, car il y a trop de pouvoir en place au-dessus de lui : conseil municipal, départemental, régional, assemblée nationale, sénat, justice et les places sont chères et inaccessibles sans piston. Nous sommes dirigés par une "élite". Bien sûr encore faudrait-il considérer l'ENA comme une grande école, poussant à la réflexion et à la pensée personnelle, alors qu'elle semblerait au contraire, développer le conformisme extrême de ses étudiants !

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