dimanche 27 octobre 2013

Synthèse des données trouvé sur le web concernant le mécanisme d’ASMR




Il y a peu j’ai fait une liste sur le site Sens Critique de morceaux qui créent en moi des frissons à chaque écoute ou presque. Sur ça, une personne a réagi en disant qu’il s’agissait d’un ASMR pour Autonomous sensory meridian response que l'on peut traduire par « réponse de méridien sensoriel autonome ». Un mécanisme évoquait en 2008 et qui ne se repose sur aucune recherche scientifique. De plus comme ce mécanisme n’est pas présent chez tout le monde mais soit disant aux plus sensibles, il est sujet à controverse et est parfois discrédité.
Le mécanisme décrit une sensation distincte, agréable et non sexuelle de picotement au niveau du crâne, du cuir chevelu ou des zones périphériques du corps, en réponse à un stimulus visuel, auditif, olfactif et/ou cognitif. La nature et la classification scientifique du phénomène fait l'objet de controverses.
Voici un exemple d'expérience sensitive particulièrement concluant (à écouter avec des écouteurs et dans le calme, ça demande aussi pas mal de concentration) :
http://www.youtube.com/watch?v=RVpfHgC3ye0

Répondez ensuite à ce sondage qui permettra d’y voir un peu plus clair : https://sites.google.com/site/asmrinfo/sondage

En fait, depuis ma plus tendre enfance je vis ce phénomène, mais je ne m’étais jamais posé la question d’où il provenait. Il était naturel pour moi et étonnamment je n’avais jamais pris conscience de sa portée et de son importance. Je me souviens très bien qu’au CE1/CE2 en voyant une de mes camarades (Liza) en train d’écrire sur sa feuille, le son et ce contexte où elle s’appliquait à écrire pour répondre à un exercice provoquaient en moi frémissements et un plaisir fort, mais seulement si je ne faisais rien d’autre que d’observer son stylo se déplacer sur sa feuille. Cette expérience je l’ai vécu de nombreuses autres fois dans des contextes très différents.

Par exemple, cette sensation n’a lieu que dans un lieu extrêmement calme, voire parfaitement silencieux où seul un son faible mais audible subsiste. L’objet ou la personne produisant ce son doit être particulièrement doux et lent. Bien qu’anodin elle engendre une certaine tension dans l’atmosphère. Cela peut être des chuchotements ou un son léger quelconque. Je crois que c’est toujours lié au son mais ça peut être conjoint et renforcé par d’autres effets faisant intervenir d’autres organes sensitifs.

De même ses effets varient grandement. Parfois, il peut être une sensation de chaleur, un frisson dans le dos ou sur les membres, des chatouillements ou il peut même être excitant.

Cette sensation peut s’apparenter à un baiser dans le cou qui produirait des frissons dans tout le corps. Mais comme je le disais, ce n’est pas sexuel et certains ne comprennent pas ce mécanisme car ils ne l’ont jamais vécu (les pauvres) et donc doutent de son existence.

Les vidéos d’ASMR présentes sur le net créent des situations très différentes afin de percevoir ces sensations : jeux de rôle : séance chez le médecin, recherche archéologique, coiffeur, maquillage ou alors plus simplement écriture ou murmures. Ces situations ont pour but de relaxer les personnes particulièrement anxieuses, lutter contre l’insomnie, méditer, ne plus penser à rien. D’ailleurs les techniques employées sont utilisées dans certaine séance de psychologie, en sophrologie ou lors de la pratique du yoga. Il semblerait que les sujets les plus sensibles soient particulièrement anxieux ou fatigués. On est donc surement plus réceptif le soir que le matin à cause de la fatigue accumulée durant la journée.


Je crois que juste en y pensant, on peut ressentir les effets. Par contre, je ne crois pas qu’on puisse se le faire pour soi-même, les sons doivent provenir exclusivement de l’extérieur, on ne doit pas avoir le contrôle.

Anecdote, depuis les années 90, certains scientifiques les appellent les sons synchronisés, ils s’en sont servi pour des opérations chirurgicales et ont vu une diminution significative du besoin de tranquillisant (28µg) chez les sujets qui écoutaient ces sons synchronisés, par rapport à ceux qui n’écoutaient rien ou qui écoutaient de la musique classique (124 et 126µg)


Un des plus connus de ces compositeurs de «synchronisation hémisphérique» s’appelle Marc Pouliot. C’est un ingénieur canadien qui vend des CD intitulés «Sommeil profond-Océan» ou «Concentration et pensée Positive» assortis d’infrasons, imitant les ondes delta ou alpha produites par notre cerveau et que nos oreilles ne peuvent pas détecter. Cette bande-son est censée modifier notre état mental. Mais, ce n’est qu’un exemple d’ASMR.

Il semblerait que ce plaisir sensoriel se développe avec l’expérience. Une personne pose d’ailleurs cette hypothèse :

« Je me demande dans quelle mesure ce n'est pas proche de ce qu'on entend plus ou moins indistinctement lorsque l'on est bébé, ou petit enfant. Entendre des choses en tant que simple environnement sonore, sans se sentir obligé de comprendre, de participer, de réagir. Au tout petit enfant, on parle doucement et gentiment, on ne lui demande pas de donner, il est (dans certains moments bien sûr, et je parle vraiment d'un petit enfant) un simple récepteur-jouisseur.
L'ASMR paraît être un moyen de se laisser bercer finalement. »

D’après les résultats d’un sondage que j’ai pu trouver : les femmes comme les hommes semblent réceptifs.
Les sons produits par des femmes touchent autant les hommes que les femmes et vice versa. La majorité des gens se sert de ce mécanisme pour dormir ou se détendre. Les murmures les légers grattages et l’attention d’une personne très proche de nous sont les facteurs qui semblent être les plus efficaces.

Ces sensations se nomment en anglais « tingles ».

Autre anecdote, il y a un projet de court métrage d’une véritable histoire produisant des tingles sous la coupe d’une jeune américaine. Le phénomène n’en est qu’à ces balbutiements, mais elle parle déjà de « bénéfice potentiel », ce genre de réaction me rend triste mais bon… Tout rapporter à l’argent ça devient lassant… Je suppose que les gens s’adaptent au système. D’autant que la société américaine encourage d’autant plus ce genre d’initiative.

Enfin bref, ce mécanisme d’ASMR est fascinant, agréable et encore bien mystérieux.

Un singe en hiver film de Henri Verneuil (1962)


Mais qu’est-ce qu’il te prend à dire « Yep » comme ça ?


Ode à l'ivresse, aux promesses et à l'amitié    
Des sensations qu’ils pensaient perdues à jamais
Malgré l'inquiétude de celles qui les aiment
Ils se laissent aller à manger des nems

Deux histoires où deux voyages s’entrecroisent
Deux hommes émerveillés par différents paysages
L'un l'Asie berceau du Yang Tsé Yang le célèbre fleuve
L'autre l'Hispanie théâtre où toréadors se meuvent

Les générations sont alors mélangées
Pour matérialiser les phantasmes songés
Le vieil homme rajeuni par le bourbon
Et le jeune homme vieilli par la boisson

Feux et lumières se déchainent en cette nuit troublée
Deux ivrognes prennent l'air pour mieux s'imaginer
L'un cause marine l'autre spectacle madrilain
Mais ils se rejoignent sur le même point

Et c'est durant cette fête emplie de gaieté
Où nos deux amis sans jamais se lasser
Ont embrigadé un troisième tout aussi enchanté
De mettre fin enfin à cette morosité

Hélas ce théâtre prend fin au matin
Quand la réalité ne passe plus son chemin
Les obligations reprennent leurs droits
C'est l'heure des adieux dignes des plus grands rois

C’est vers le printemps que père et fille se déplacèrent
Alors que le vieil homme entra dans un long hiver

mercredi 23 octobre 2013

Barbie : le Secret des Fées de William Lau (2011)




J’ai longtemps hésité à mettre 10 (j'ai mis 9) puis je me suis finalement dit : « Non non non pas 10 ! Que justice soit rendue ! ». « Pourquoi ? » me demanderiez-vous. Eh bien, en soutien aux brunes. Eh oui, William Lau le réalisateur a oublié le précepte de Lio « Les brunes ne comptent pas pour des prunes ! »  et a façonné dans ce Barbie : Le secret des fées, Raquelle une brune méchante extrêmement (et je pèse mes mots) dévalorisée tout le long de l’œuvre, et ça c’est vraiment pas sympa !

Situation initiale : Barbie est sexy, normal elle est mannequin et amoureuse. Amoureuse de qui ? Je vous le mets dans le mile, du beau blond aux yeux doux, Ken bien sûr !
Hélas ! Voilà que vient l’élément perturbateur : le pauvre homme se fait kidnapper par les fées de Gloss Angeles, dirigée par la terrible reine des fées aux cheveux roses Graciella ! A ce moment de l’œuvre, la surprise est de taille : des fées méchantes ! C‘est un véritable parti pris d’Elise Allen la scénariste. Heureusement il reste de gentilles fées Carrie et Taylor (mon cœur commençait à larmoyer), qui ont une beauté proportionnelle à leur jugeote :
« Comment on va pouvoir le sauver ? En faisant du shopping bien sûr ! » (franchement c’était évident).

L’œuvre fait preuve d’une rare finesse, nous fournissant parfois des clins d’œil de notre vie quotidienne afin de mieux nous identifier à la vie de Barbie, par exemple : je suis sûr que tout le monde a déjà remarqué que dans les cabines d’essayage des magasins, il y en a toujours une qui est fermée alors qu’elle est vide, eh bien on nous explique pourquoi dans Barbie, je ne spoilerai pas mais l’explication m’a quelque peu désarçonné.

Les lieux sont idylliques et magnifiés par des graphismes flous, fluo et tapageurs : des couleurs flamboyantes qui pétillent dans nos orbites fascinées par cette narration emplie de magie. Certains diront que les décors manquent de profondeurs et de détails, je dirais plutôt qu’ils sont épurés afin de nous proposer juste l’essentiel pour être absorbé dans ce monde féerique : en somme, des textures minimalistes et efficacement aveuglantes.

On passe d’une ville américaine à la Beverly Hills au sommet de la tour Eiffel en pleine nuit, où notre héroïne s’extasie devant la beauté des immeubles et des voitures parisiennes qui éclairent son passage à travers les plus belles avenues de la capitale tant rêvée. Barbie est tout simplement happée dans une véritable épopée digne d’un héros grec, eh oui comme toute aventurière de renom, ce n’est pas elle qui part à l’aventure mais c’est l’aventure qui vient à elle. Elle se retrouve donc guidée par nos deux gentilles fées jusqu’au… et là je vais vous surprendre… royaume des fées !

Elément amusant, je parlais de héros grec et je ne croyais pas si bien dire : Barbie et ses amies seront sauvées pas les légendaires mini pégases, les créatures les plus indomptables du monde des fées.
Autre bonne trouvaille, l’une des deux gentilles fées a des pouvoirs magiques d’une puissance proportionnelle à la beauté de la paire de talons qu’elle porte, l’autre possède un sac à main qui contient des babioles à l’infinie. Le caractère superficiel des jeunes femmes est ainsi présenté avec justesse.

L’œuvre est marquée par un réel aspect sociologique. On nous rappelle subtilement la supériorité de l’homme sur la femme quand on nous présente la gérante du magasin Ailes et compagnie dire à son mari qui vient à peine de l’ouvrir « Oui tu as raison mon chéri, une fois de plus ! ». Les hommes du monde des fées semblent avoir toujours raison ce qui n’est pas sans rappeler notre monde à nous en déplaise aux féministes. Dans le même registre notre pathétique brune Raquelle déplore mais assume une vérité pas toujours facile à vivre : « Les femmes sont changeantes, c’est ainsi. ».

Ajoutons que ce chef d’œuvre est saupoudré avec parcimonie d’un humour accablant de malice : le rival de Ken possède un accent latino proprement hilarant : « Ma què cè qué ca vé dire ?! », les jeux de mots sont de sortie : Ascenciel (mélange d’arc en ciel et d’ascenseur) et lorsque notre pauvre Ken se retrouve dans une situation difficile car étant affublé d’une armure trop étroite, notre empathie pour lui à son paroxysme se trouve délivrée par ses paroles d’une grande spontanéité : «Vous n’auriez pas un ouvre-boîte dans les environs ? ». Prodigieux n’est-ce pas ?

L’œuvre se termine par un intense combat où la puissance de la colère de la princesse des fées aux cheveux roses produit des arcs en ciel et des paillettes afin de blesser sauvagement l’innocente Barbie. Graciella qui plus est, assez étonnamment  d’ailleurs, a su maîtriser, surement après de longues années de méditation, l’art du Hadou de Street Fighter, projetant des HA DOU KEN à ces ennemis les plus retors.

Je ne dévoilerai pas la fin, mais je tiens tout de même à rassurer les plus sensibles d’entre vous que l’histoire se termine bien.

Je vous laisse sur le morceau phare de ce Barbie : Le secret des fées (باربي والسرية الجنية en arabe) afin que vous puissiez vous rendre compte des efforts extraordinaires produits pour concocter la bande sonore du film.

http://www.youtube.com/watch?v=Z2Mqn6FVTcc



jeudi 17 octobre 2013

Porco Rosso film de Hayao Miyazaki (1995)


A quoi reconnaît-on une grande œuvre du cinéma ? Eh bien, c’est quand il ne se passe pas grand-chose mais que l’on a envie que cela dure. Ce peu est jouissif. En gros dans Porco rosso (Cochon rouge vif), il se passe trois choses : la récupération des otages, la réparation de l’hydravion et le duel avec l’amerloque. Mais l’atmosphère est tellement émouvante et drôle que cela a pris de part chez moi.


Commençons par ce second point, l’œuvre est hilarante grâce à l’idée de base : un halouf meilleur pilote au monde d’hydravion, affublé d’une subtile moustache et qui a un penchant certain pour la pignole et la picole (ça rime). De cela, le comique peut se répandre à tour de bras avec facilité, on a donc le droit à des : « Il y a un mandat contre toi [...] pour exhibitionnisme porcin » ou encore à « Marco tu vas finir en rôti de porc ». Mais l’humour ne vient pas que de cette idée qui favorise le décalage, non, le décalage est partout. Des petites filles amusées d’être kidnappées, incroyablement à l’aise et indépendante, à l’équipe de femmes de l’atelier de réparation d’hydravion de Piccolo, avec en prime une jeune génie Fio, éprise à la fois d’hydravion et de Marco qui doit avoir deux fois son âge.

Mais l’écart ne s’arrête pas là car l’œuvre se paye le luxe de mettre en premier plan des légèretés de dessins animés sur un fond d’horreur de la montée du fascisme italien des années 20 et la tourne même en dérision.

Le film est aussi émouvant car contrôlé dans les sentiments mais pas dans la poésie. Marco est un personnage entouré de mélancolie et de réserve dans l'aspect qu'il renvoie, mais aussi très pudique : bien qu’il ait deux très belles femmes à ses pieds, il choisit de continuer sa vie seul par peur de décevoir, de rendre triste et par risque de mettre en danger celle qu’il aime. Il a un cœur gros comme ça, préférant faire perdurer ses rêves de relation amoureuse plutôt que de prendre l’amour à bras le corps, peut-être par honte de lui-même. Pourtant ! Quand il est amoureux, il retrouve sa forme humaine. C’est l’amour à son paroxysme qui est le contre sort du charme cochonisant qui lui a enlevé tout charme humain. En échange de cette métamorphose, il a pu rester en vie durant un moment particulièrement périlleux de la première guerre mondiale : tu peux continuer à vivre, mais tu vivras seul et sans l’amour de tes proches en souvenir de tes camarades tombés au combat qui n’ont pas eu le droit à cette seconde chance, que tu as mérité pour avoir été le dernier de ton escouade à être en vie. Ainsi on est tiraillé entre rires et pincements de le voir accepter la solitude. Son aspect lui rappel constamment le passé et il n’a pas de futur car toujours en fuite du gouvernement qui cherche à l’éliminer, il est condamné à vivre dans le présent se contentant de plaisirs simples et éternellement ponctuels.


Alors certes, la fin est abrupte et un peu trop ouverte pour certain, mais quand on est enchanté par tant de poésie, nul besoin de rationnel, on se laisse juste guider par la mélodie du générique de fin qui nous sort progressivement du monde façonné par Miyazaki à la fois dur et onirique.

mercredi 16 octobre 2013

Pensées sur l'utilisation de la nature humaine dans les débats et critique du libéralisme (16/10/2013)




Lors des débats évoquant de près ou de loin l’Homme, il y en a toujours un qui, à court d’argument rationnel, tente de s’en sortir en évoquant la nature humaine. « De toute façon l’Homme a toujours été égoïste car c’est dans sa nature, on ne peut le changer ».

Je pense qu’il est très difficile d’avoir la moindre certitude lorsqu’on parle de nature humaine, on peut néanmoins fournir quelques hypothèses sur celle-ci.
Un comportement dicté par l’instinct de survie, qui ne peut être dépassé pour devenir autre chose. Un état d’esprit qui n’a pas changé et qui ne pourra jamais ne serait-ce qu’évoluer car bien trop ancré en nous. Quand on parle de nature humaine, on n’évoque pas le comportement singulier de chacun d’entre nous, mais on fait une moyenne de la masse, de la populace, le but étant d’en tirer non pas des vérités générales applicables dans n’importe quel contexte, mais des pistes qui nous semblent être le plus proche de la réalité et permettant de mieux comprendre les désirs de tout un chacun, de mieux expliquer comment on en est arrivé à la situation actuelle, à cette société basée plus sur la compétition que la solidarité par exemple.

Mais avant cela, pourquoi en venant-on fréquemment à cet aspect originel de l’Homme, qui comme présent dès le départ, serait pour nombre d’entre nous à jamais inchangeable ?

Quand on en vient à évoquer cette nature, on est souvent influencé par un point trop important : le fait que la plus grande majorité de l’humanité accepte et vive dans le même système, le système capitaliste ; et donc qu’on peut en tirer des vérités générales, vu que tout le monde fonctionne de la même manière. Mais, car il y a un mais, est –ce que l’Homme a le choix ?
Le suivisme chronique vient-il de notre nature, où tout simplement parce que cela demande une très forte personnalité et une prise de risque incroyable, pour tenter de vivre à sa manière ?
Je pense que ce conformisme est plus associé à la peur de vivre dans de mauvaises conditions et d’avoir absolument besoin de se remettre en question soi-même, aussi bien que ses semblables. Car une remise en question demande certains prérequis :
- une prise de recul suffisante pour avoir la lucidité de la situation
- l’acceptation de perdre nombre de ses points de repère pour s’en créer d’autres, ce qui est anxiogène
- une bonne confiance en soi pour deux raisons : car nos points de repère ne viennent plus de notre entourage conformiste mais de nous-même, comment savoir si on ne se trompe pas ? Il faut aussi accepter d’être à contre-courant, c’est-à-dire de se retrouver sans cesse dans une situation de désaccord avec autrui, ce qui est éprouvant. A cause du fait que l’on incarne une minorité, on se retrouve en permanence sur la défensive à tenter de prouver que ce que l’on pense nous semble se rapprocher le plus de la vérité, essentielle pour avancer.




Revenons-en à nos moutons : pourquoi ce besoin d’élucider ce qu’est la nature humaine ?

Eh bien c’est simple et complexe. Simple, car ça simplifie nos interprétations du monde, la nature humaine est comme ça, on n’a pas besoin de chercher plus loin, le débat est clos. Il n’y a plus cent comportements envisageables, mais un seul. C’est aussi rassurant, pour savoir comment se comporter avec les autres, il est primordial de comprendre un minimum l’autre, afin de ne pas le heurter ou ne serait-ce que pour pouvoir communiquer avec lui. Comprendre autrui dans le but d’échanger. On n’aime pas les gens que l’on a du mal à cerner car ils nous mettent mal à l’aise. Dans la vie de tous les jours on est toujours dans l’observation pour adopter telle ou telle attitude afin d’être vu sous un bon jour. Mais si on ne voit que quelque chose de flou en l’autre, comment savoir quoi faire ? Comment réussir à se montrer sympathique sans pour autant être sans défense, car il est nécessaire de pouvoir se protéger si on se retrouve dans une situation difficile. Peut-on accorder notre confiance ? Et surtout, jusqu’où ? Jusqu’à quel point puis-je me dévoiler en face d’une personne pour laquelle je n’arrive pas à éprouver de l’empathie ? La question restera sans réponse tant que l’on n’aura pas fait des tests afin de comprendre un peu mieux comment il fonctionne. Par exemple : dévoiler brusquement une partie de ce que l’on est et observer l’effet suscité ou parler d’un sujet épineux qui se prête souvent au débat. L’estime de soi est essentiel au bonheur et on a besoin d’elle pour être heureux, sauf que cette estime dépend des autres, d’où l’importance du regard de l’autre et de son appréciation.

Complexe, car je sens qu’il y a autre chose mais je n’arrive pas encore à l’entrevoir, je vais donc écrire comme les idées me viennent.
Bon d’abord, il y a le côté rassurant de se dire que comme le comportement est lié à la nature humaine, on est sûr de nous, plus de doute possible, l’Homme est comme ça, point. On préfère se donner des repères falsifiés, en se faisant croire à nous-même qu’ils sont certains, plutôt que de vivre avec une certaine dose de mystère. Je pense que ce sont les êtres les plus fragiles psychologiquement qui auront le plus souvent recours à cette vérité incertaine. D’autres arriveront à vivre en acceptant de ne pas savoir, par confiance en leur capacité d’adaptation peut-être.

Je parlais de mystère, nombre d’individu ont préféré croire plutôt que douter : l’une est une démarche basée sur la croyance du mystique et de l’irrationnel, l’autre est une démarche empirique visant à comprendre très progressivement en acceptant de se tromper.
Pour les premiers je pense bien sûr à la religion qui permet deux choses. Elle donne bien qu’irrationnelles, des réponses sur des sujets inexpliqués et nous permet de nous déresponsabiliser : de toute façon les événements qui arrivent, arriveront ou qui sont arrivés ne dépendent pas de moi, je n’ai donc pas fait d’erreur, je n’ai pas non plus besoin de me remettre en question. Plutôt que d’évoluer je m’en remets à Dieu et il n’y a pas de raison que tant que ma ferveur est grande il m’arrive un malheur quelconque. Finalement, penser ainsi est un abandon et une fuite face à une situation où il faudrait se battre. Je préfère décider de m’en remettre à Dieu plutôt que de prendre du recul face à un contexte qui est très dur à tolérer. C’est de l’auto aliénation afin de se protéger, donc une forme d’auto médication psychologique. C’est loin, à mon avis, d’être quelque chose de négatif. En effet, les conditions de vie de certains lieux sont parfois tellement terribles qu’il vaut mieux continuer à vivre avec ce soutien, plutôt que mettre fin à ses jours ou sombrer dans une forme de drogue qui tuerait à petit feu. La religion permet d’investir ses forces vers un idéal commun, elle peut permettre plus de solidarité par identification à l’autre : cet homme en face de moi vît dans les mêmes conditions de misère et en plus il partage les mêmes convictions, si je lui viens en aide il en fera surement de même pour moi.

Evoquer la nature humaine peut permettre de ne pas perdre la face lors d’une discussion, comme je le disais au début et permet de prendre l’ascendant sur l’autre injustement par le biais de syllogismes bien trop simplifiés pour tenir debout. Cela casse le débat, car l’un tente d’employer des arguments rationnels alors que l’autre emploie la nature humaine comme une vérité générale et même s’il tente de prouver par des arguments rationnels que la nature qu’il décrit est concevable, il entraîne irrémédiablement un éloignement du sujet d’origine. Le sujet n’est plus : pourquoi les gens sont individualistes ? Mais, quels sont les exemples qui prouvent que c’est une caractéristique inhérente à quiconque peu importe l’époque ? Le débat se retrouve encore plus ouvert qu’il ne l’était et il est encore plus dur d’avancer : car on ne parle plus du contexte actuel mais le sujet diverge vers le contexte permanent et absolu, rendant la tâche encore plus ardue.
Bien sûr en parlant d’un comportement, spontanément le débat va se tourner vers l’origine de celui-ci, mais s’il ne s’y tourne pas progressivement, un grand nombre de spécificités ne seront pas pris en compte, les idées seront donc biaisées. Il ne faut pas chercher à aller trop vite, les raccourcis vers la découverte de la vérité n’apportent que des idées fausses, il faut au contraire progresser lentement, hypothèse par hypothèse. Un sujet aussi difficile et vaste que « Pourquoi l’Homme est-il individualiste ? », ne trouvera pas de réponse dans la soirée, on peut néanmoins en tirer plus de matière à réflexion et une meilleure capacité à penser et à se concentrer, en procédant méticuleusement.
Ainsi donc, celui qui évoque la nature humaine aura tendance à ne pas vraiment apprécier de réfléchir pour réfléchir, ce n’est pas dans sa personnalité, peu de gens au final aiment développer des pensées à plusieurs en tentant d’évaluer toutes les possibilités qu’un sujet implique, quitte à y passer des années.

Donc si on résume pour le moment on en est à : la nature humaine est évoquée : pour se rassurer en se donnant des points de repère, pour prendre l’ascendant dans un débat, pour se faciliter la tâche entraînant inéluctablement la non étude d’un grand nombre d’hypothèses, par manque d’amour pour la réflexion abstraite, car elle permettrait d’accéder rapidement aux origines d’un constat et donc d’en déduire relativement rapidement un semblant de vérité.

On ne sait pas exactement comment l’Homme préhistorique se comportait et vivait et même si on le savait, on ne pourrait savoir si la même logique s’appliquerait encore aujourd’hui. De même, comparer l’Homme à un animal est tout aussi maladroit et faux : on sait comment certains animaux fonctionnent que de manière très imprécise et le monde animal est tellement vaste qu’aucune vérité générale ne peut être tirée. De plus l’un a la possibilité de penser, de construire un raisonnement abstrait et pas l’autre (ou alors de manière seulement simpliste, incomparable donc).

C’est en cela que je ne pense pas que l’Homme soit encore un animal. Il l’a été c’est une certitude, peut-être il y a 100 000 ans, peut-être plus, peut-être moins. Mais il s’est depuis bien longtemps sortie de l’évolution décrite par Darwin. Plus aucune logique ne s’applique à lui. Darwin pensait évolution par les gènes. L’environnement changeant crée des mutations aléatoires nous permettant de survivre. Aujourd’hui notre évolution dépend d’un autre facteur : nos découvertes. On peut se prémunir du froid par la technologie et encore plus fort, on n’est plus à attendre que nos gènes évoluent selon les lois de la nature puisqu’aujourd’hui on en fait ce que l’on veut (bien qu’il nous reste encore beaucoup à découvrir sur leur fonctionnement). La survie dépend pour les êtres vivants non humains, de la nature et de notre comportement vis-à-vis de celle-ci, notre survie dépend de nos avancées dans la compréhension de notre monde et ce qu’on en fait.

Alors ceux qui disent que parce que la sélection naturelle a toujours prévalu, il y aura toujours de la compétition entre les êtres humains, ils sont dans l’erreur car ce raisonnement est bien trop simpliste. D’autant que cette sélection s’applique aux animaux mais plus aux Hommes. L’Homme est biologiquement un animal, mais pas dans ses capacités. D’ailleurs biologiquement ne signifie pas grand-chose quand on sait que certaines classes de champignons sont rangées dans la case animale. Même en science ce qui rentre dans la catégorie animal est ambigu et ce classement va continuer d’évoluer. Sociologiquement l’Homme n’est pas plus animal, qu’un arbre ou une plante, car son comportement est aussi éloigné des animaux que l’écart qu’il y a entre ces derniers et les végétaux. La nature dirigeait tant que les êtres vivants étaient guidés : soit par les aléas des événements, soit par l’instinct de survie ; mais l’Homme, lui, il est loin de tout ça, il pense et a surement le potentiel pour comprendre énormément de choses de ce monde et donc le tourner à son avantage.



Pour finir, si on reprend l’idée de départ : «De toute façon l’Homme a toujours été égoïste car c’est dans sa nature, on ne peut le changer »
Pourquoi sa nature serait d’être égoïste ?

Partons du présupposé qu’il a besoin d’être heureux et on prend le cas où il n’est pas seul mais vît en société. Pour qu’il soit heureux, il faut qu’il ait une certaine estime de lui-même. Estime possiblement acquise par les appréciations positives de ses contemporains et par leur bien-être. Je pense qu’il est difficile d’être parfaitement heureux si on sait que d’autres ne le sont pas et surtout si on le voit, car il est impossible d’occulter totalement de son esprit la tristesse de l’autre. L’Homme étant toujours en proie à l’empathie, il ressentira automatiquement le malheur de l’autre qui se confrontera à son propre bonheur. Il tentera donc de se montrer sous son plus beau jour, sympathique et tolérant, mais pas que. Du point de vue de ses actions, il se devra d’aider autrui par la parole ou par des gestes plus concrets. C’est en voyant les effets positifs (le bonheur de l’autre et sa reconnaissance) qu’engendreront ses actions qu’il gagnera en estime de lui et se rapprochera du bonheur parfait. Mais, comme les inégalités dans le bonheur seront toujours présentes, il devra en permanence agir positivement pour l’autre.

Ceci peut être qualifié d’égoïsme car il fait le bien autour de lui pour se rendre heureux (que ce soit consciemment ou pas), c’est un échange et non des actions qui vont toujours dans le même sens.

On peut aussi se dire, que s’il n’y avait que de l’entraide sans perversion, il n’y aurait plus de compétition. Le problème étant les pervers narcissiques classiquement évoqués par les psychologues. Ce sont les êtres qui font croire qu’ils apportent du bien autour d’eux mais en fait ne font que prendre et détruire. Ils ne peuvent être heureux que sur le malheur de l’autre ou plus exactement son état d’assujettissement, l’autre n’est jamais sur un pied d’égalité avec lui et ne doit pas s’en rendre compte, s’il s’en rend compte et tente de se protéger, le pervers narcissique tentera de le faire culpabiliser afin qu’il retire ses défenses et si cela échoue, il jettera son dévolu sur une autre personne faible, car sortant d’un moment difficile.


Tout Homme est surement égoïste, mais l’est-il tout le temps ?
Dire que oui, signifierait que l’altruisme n’existe pas, or je pense qu’il existe réellement. Pourquoi existe-il et dans quelles conditions ?

Un individu n’ayant à un moment de sa vie (pas toute sa vie !), aucune carence en estime de lui, peut donner sans rien attendre en retour, car il est déjà parfaitement heureux : il ne manque de rien, en tout cas c’est son impression. C’est l’impression qui compte sur la situation, car la situation vue d’un autre œil sera toujours analysée de manière subjective et ne permettra pas de se rendre compte du véritable état d’esprit de cette personne si heureuse. Quel que soit le contexte, s’il est heureux car sans frustration et sans désir inassouvi, il pourra ne plus être égoïste mais être altruiste.

C’est en cela que la société de consommation est contraire au bonheur et à l’altruisme. Le désir étant omniprésent, on ne peut jamais être parfaitement satisfait de sa condition, cette frustration peut se transformer en énergie positive si elle passe par des actions de solidarité, certes elles seront égoïstes mais créeront du bonheur chez l’autre et chez nous ; l’autre qui pourra nous aider dans un moment plus difficile pour nous, le cercle sera donc vertueux.

Le fait que le système pousse au libéralisme absolu c’est-à-dire à une société basée sur le sans limite :
- sexuel : multiplier les aventures, les mariages
- matériel : accumuler toujours plus de richesses, prôner la technologie, ce fameux « progrès »
- corporel : opérer des changements dans son anatomie, donner l’espoir qu’un jour l’Homme sera immortel
; ne peut avoir pour conséquences que l’individualisme de chacun afin d’assouvir tous ces sujets à frustration et donc l’éloignement de l’état de bonheur.
En effet, de manière logique, il est plus facile d’atteindre le bonheur en ne désirant que peu, plutôt qu’en souhaitant obtenir une infinité de choses. Dans ce dernier cas le cercle est vicieux : l’individualisme dû aux envies personnelles, pousse à la compétition qui éloigne du bonheur car il y a la recherche de faire mieux que l’autre. Les individus pouvant progresser indéfiniment, le meilleur ne le restera jamais longtemps et cherchera toujours à s’améliorer, il ne se contentera jamais de sa situation, sera continuellement frustré et donc bien loin du bonheur. Et même s’il pense être heureux, les traces d’empathie qu’il a pu garder lui amèneront inévitablement de la tristesse pour son entourage, qui lui sera malheureux de n’avoir pu être le meilleur, de ne pas avoir gagné cette compétition et de posséder moins.

La société du sans limite n’apportera jamais rien de bon, à part inégalités et renfermements sur soi-même. Les conséquences secondaires sont la facilité avec laquelle la publicité ou les médias font que l’on accorde une bien trop grande importance à notre image physique et au caractère superficiel des discussions et des relations (utilisation à outrance de téléphone portable, émissions entre autres de télé réalité abêtissantes). Cette pression entraîne que jamais l’esprit ne pourra avoir plus d’importance que l’image. Pourquoi ? Parce qu’avec un esprit moral basé sur la justice, tôt ou tard, l’Homme ressentira le besoin de remettre en question ses valeurs ce qui nuirait à la société capitaliste qui ne peut perdurer que si l’Homme ne pense pas,  s’il est continuellement aliéné et réduit en esclavage par l’argent et les biens.


Ceci conclut ces pensées qui sur la fin sont un peu parties dans tous les sens et clos ce chapitre sur l’emploie de la nature humaine, surement que j’en reparlerai plus tard, les sujets évoqués donnant matière à réflexion.

lundi 14 octobre 2013

Program Music I album de Kashiwa Daisuke (2007)




"Kashiwa Daisuke est né à Hiroshima et habite maintenant à Fukuoka. Il a appris la guitare lorsqu'il était jeune et a créé un groupe de rock progressif avant de lancer son projet solo en 2004. En solo son style est assez similaire à ce que font World's End Girlfriend ou Akira Kosemura c'est-à-dire une musique ambient electro qui mêle intimement instruments classiques et sonorités électroniques sous une forme très progressive." Program Music I est une oeuvre d'une heure composée de seulement deux morceaux : Stella et Write once, Run Melos, un disque pour le moins surprenant.

Début in medias res :
Si on prend Stella en cours, on aura le droit à des sonorités de classique avec une formation violon/violoncelle/piano et une voix enivrante qui conduit la chanson par petite touche. Et, en plus de cela, on aura divers effets électro des frises, des sonorités électroniques, une rythmique très instable. Puis une batterie rend la musique plus conventionnelle, la rythmique devient plus rapide. Les sons s’arrêtent et reprennent aléatoirement, de piano clochette ou du passage précédent enregistré en fond. C’est très surprenant de réentendre la session précédente dans ce nouveau passage : lutte et tristesse se confrontent alors. Puis cela devient très décousu et on passe à une nouvelle atmosphère qui mélange les précédents, puis ne laisse intervenir qu’un seul instrument à la fois durant seulement quelques secondes, instruments constamment bloqués dans leur élan. Daïsuke s’amuse avec tout ce qu’il a mis en place, en faisant intervenir de nouvelles sonorités, clarinette et tambour, puis la session devient plus rythmée, électro toujours saccadé bien que très rapide, allègre puis constant et  enthousiasmant.

Riche et surprenant, Daisuke met tout en œuvre, pour faire intervenir en nous tout un panel d’émotion, se servant de genres différents : jazz, classique, électro, ambient, rock ; il utilise aussi toutes les rythmiques des plus lentes au plus rapide allant jusqu’à la saccade.
A la manière d’un Aphex Twin, il n’y a que l’indépendance et le mélange qui priment : on entend le train au loin, puis le violon, cela fait aussi penser à A Silver Mount Zion, donc post-rock. Le temps est pris sur ce premier morceau de 35 minutes afin de nous dévoiler les aléas de la réalité, l’inconstance des émotions envoyées sont au diapason de la succession d’événement d’une vie. Contrebasse joue une note par ci par là, le piano en fait de même. Avec peu de notes, Daisuke fabrique beaucoup de sensations, des sensations puissantes, je ne pense pas qu’il soit possible de rester de marbre face à cette œuvre.

Write once, Run Melos : spectral et parasité, coupure, musique classique, puis coupures nombreuses et jazz, déconcertant, on tente tant bien que mal de se raccrocher aux structures plus constantes, aussi rares soient-elles, elles sont tout de même pour nous un moyen de souffler.
On est toujours dans la découverte, on ne peut cesser d’être surpris constamment face à ces atmosphères incroyablement changeantes. A peine s’habitue-t-on à un semblant de structure qu’il change trois fois. Revient, repart. Mais ce n’est pas fatiguant, car c’est souvent très harmonieux. Cela fait penser aux événements qui pourrait arriver lors de la fin d’un monde, où des musiciens de sensibilités différentes, jazz, rock, classique continueraient à jouer jusqu’à leur mort prochaine.

Forcément, les erreurs seraient nombreuses, la rigueur ne serait pas au rendez-vous, mais l’émotion en serait grandie. Jusqu’où pourront-ils continuer à jouer ? A quand la dernière note ? Il n’y a pas eu de concertation, l’heure est à l’improvisation. Malgré les bâtiments s’effondrant et la peur qui se lit dans les visages du public, la musique continue avançant inexorablement, des notes se tournant vers un futur plus favorable, vers une renaissance après l’apocalypse. Nos artistes préfèrent ne penser qu’à la musique, au risque de se laisser subjuguer par leur émotion, ce qui les empêcheraient de continuer.

C’est un discours optimiste et sain qui se profile, car les émotions sont métamorphosées en énergie positive par le biais de leur instrument. La communication n’est que musicale.

Et si la communication entre individu ne pouvait se faire que d’une seule manière ? Que la seule voix qui sortirait serait-celle des instruments ? Est-ce que cela donnerait quelque chose comme ce que nous propose ce titre ?

Espoir et chaleur tourbillonnant autour d’une peur et d’une colère cachées qu’à moitié mais tout à fait dans l'air du temps. Les sonorités bien qu’aléatoires sont d’une grande précision et d’une justesse bouleversante, malgré les frises bien trop présents pour une musique qui se voudrait parfaitement mélodieuse.  Le temps capricieux nous empêche de bien percevoir la musique jouée, mais on tente de rester au mieux concentré sur ce que nous proposent ces artistes qui vivent surement leurs dernières heures.

De quelle manière aimerions-nous placer nos dernières énergies ? Les musiciens l’ont choisi.

Constat grisant : leur plus belle œuvre naît juste avant leur mort, ce ne sera qu’au ciel qu’ils pourront jouir de leur popularité post-mortem. A se demander s’il ne faudrait pas être toujours proche de la mort, pour penser et créer art. Un moment où des émotions autant à leur paroxysme qu’incontrôlables naissent en nous et que l’on transfère dans l’œuvre en train d’être façonnée. En comparaison, dans un contexte différent les autres œuvres sembleraient bien fades, plus humaines et donc plus restreintes car limitées par des pressions sociales, nous empêchant de nous libérer complétement. Ce n’est que totalement libéré que l’artiste peut montrer ce dont il est capable.

Les dernières notes de piano ralentissent, l’album s’arrête.

Le caractère décousu et libre de ce texte est directement analogue aux caractéristiques de cette oeuvre mystique et indépendante. Kashiwa Daisuke a dû en vivre de belles pour fournir un travail de cette qualité, merci à lui.